Alors que la France est en dessous de la moyenne européenne pour l’emploi des 55-64 ans (56 % contre 60,5 %), le Sénat a voté il y a quelques semaines un amendement pour la création d’un CDI senior, dans le texte sur la réforme des retraites.
Cette initiative visait à inciter les entreprises à recruter les plus de 60 ans et à favoriser l’insertion ou la réinsertion des seniors sur le marché du travail. Toutefois, elle a été censurée par le Conseil constitutionnel qui a estimé que les dispositions sur l’emploi des seniors n’avaient pas leur place dans un texte budgétaire.
Mais que recouvrait le CDI senior exactement ? Etait-ce vraiment un contrat si bénéfique que cela ? Etat des lieux.
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Qu’est ce qu’un senior ?
Dans un premier temps, il convient de définir ce qu’est un senior dans le monde professionnel. Il s’agit d’un individu, âgé de 50 ans ou plus, doté d’une expérience plutôt longue dans son domaine d’expertise.
Si le terme senior fait souvent référence à l’expérience d’un employé, il est aussi utilisé pour définir la tranche d’âge à laquelle appartient le travailleur.
D’ailleurs, dans le cadre de la création du CDI senior, c’est les salariés de 60 ans et plus qui étaient concernés.
Le CDI Senior
La proposition du CDI senior correspondait à un contrat de travail destiné aux salariés de 60 ans et plus. Défini comme “ une mission de fin de carrière “, il permettait de booster le recrutement des seniors, à l’heure où la France est en retard dans ce domaine.
Le lundi 6 mars dernier, les sénateurs avaient adopté ce CDI senior par 202 voix contre 123, et ce, malgré l’avis défavorable du ministre du Travail Olivier Dussopt. Le Conseil constitutionnel s’y est néanmoins opposé le 12 avril dernier.
La durée du contrat senior aurait du être calculée en fonction de la durée d’activité nécessaire au salarié pour faire valoir ses droits à la retraite.
Les missions de fin de carrière pouvaient atteindre jusqu’à 20 % du temps de travail.
Quels avantages pour ce nouveau contrat ?
Comme nous l’évoquions plus haut, ce CDI senior aurait permis à des travailleurs de plus de 60 ans de réaliser une dernière mission avant de mettre fin à leur carrière. Similaire au CDI de chantier, le temps de travail pouvait être adapté et les conditions du contrat devaient être fixées entre le salarié et l’employeur.
Des missions de tutorat et d’encadrement de jeunes pouvaient par exemple être proposées.
Qui plus est, le CDI senior, réservé au plus de 60 ans, pouvait se terminer dès que l’employé aurait atteint le seuil pour bénéficier d’une retraite à taux plein et non plus selon l’âge butoir de 70 ans.
Cependant, l’employeur devait respecter ces conditions et ne pas terminer le contrat avant l’obtention de ce taux plein.
En ce qui concerne l’entreprise, le CDI senior offrait aussi quelques avantages. En premier lieu, c’était un contrat qui présentait peu de risques pour l’employeur.
Les missions de fin de carrière proposées auraient été assez courtes et ne demandaient que très peu d’investissement pour la société concernée.
De plus, recruter un senior représente une véritable plus value pour l’entreprise. En plus d’apporter toute son expertise et son expérience, ce type de profil possède des softs skills très développées.
Aussi, les seniors savent comment répartir leur temps de travail et possèdent un sens de l’organisation rôdé. Embaucher un senior est donc bénéfique pour l’employeur.
Enfin, dernier avantage et pas des moindres, le CDI senior aurait permis aux entreprises d’être exonérées des cotisations familiales tout en respectant l’engagement de conserver le salarié jusqu’à obtention du départ à la retraite à temps plein.
L’objectif de ce CDI était de compenser le coût d’un salarié senior qui pourrait prétendre à une rémunération plus élevée qu’un jeune actif.
Le CDI senior, entre scepticisme et interrogations
Alors que la nouvelle réforme de la retraite a été actée malgré les contestations de certains politiques et surtout celles de la rue, le CDI senior a été écarté par le Conseil constitutionnel.
Et avant même ce rejet, plusieurs opposants à cet amendement avaient pointé du doigt quelques incohérences. Tout d’abord, le fait que l’employeur ne puisse pas mettre un salarié à la retraite avant 70 ans posait problème.
Que se passerait-t-il si une personne atteint l’âge du taux plein avant cette échéance ? Le CDI senior devait offrir une solution.
Autre problème, la précarité de ce contrat suscitait quelques interrogations. Si l’employeur devait s’engager à ne pas envoyer à la retraite un employé avant qu’il n’ait atteint le taux plein, il pouvait cependant mettre un terme au contrat pour des raisons économiques, motifs personnels, ou par rupture conventionnelle.
Aussi, ce CDI senior qui devait donc être un contrat à durée indéterminée n’en était pas vraiment un au final. Étant donné qu’un âge de fin de contrat serait défini, il possédait donc une échéance fixe, ce qui pouvait générer quelques complications.
Autre aspect à prendre en compte, le CDI senior pouvait favoriser la discrimination à l’embauche.
Les entreprises pouvaient très bien faire le choix de ne recruter que des seniors âgés de plus de 60 ans afin de profiter de l’allègement des cotisations, laissant ainsi de côté les employés en dessous de ce seuil.
Enfin, le CDI senior soulevait un problème de confidentialité. Pour que le salarié puisse bénéficier d’un départ à la retraite à taux plein, devait-t-il fournir des preuves et donc partager des informations personnelles en rapport avec sa carrière ?
Finalement, le Conseil constitutionnel a jugé que les mesures ciblées sur l’emploi des seniors n’avaient pas leur place dans un projet de loi de financement de la Sécurité sociale rectificatif (PLFR) et le CDI senior a été écarté de la réforme.